CBD, Chanvre

Guide sur la législation autour du cannabis en Europe

drapeau européen, les étoiles sont remplacées par des feuilles de cannabis

Alors que l’Allemagne vient de légaliser l’usage du cannabis récréatif, le 1er avril passé, la question reste encore largement débattue dans les reste des pays Européens. En Europe, la legislation concernant le cannabis récréatif, le chanvre et les cannabinoides comme le CBD, est sujet à de fréquentes modifications. Ces changements témoignent d’une reconnaissance accrue des vertus potentielles des cannabinoïdes pour la santé et des opportunités économiques que le cannabis représente en général.

Ce guide propose une exploration des réglementations qui influencent le marché du cannabis en Europe. Plus loin, nous plongerons dans les spécificités légales de divers pays européens. Nous aborderons des modifications récentes dans la legislation et leur impact tant sur les consommateurs que sur les entreprises. Enfin, nous nous pencherons sur les perspectives d’avenir et les réformes potentielles qui pourraient remodeler les normes qui régissent le cannabis et le chanvre.

Avant de plonger dans le vif du sujet, il est important de rappeler quelques notions de base…

Quelle est la différence entre cannabis, chanvre et CBD ?

“Chanvre” et “Cannabis” désignent en réalité la même plante.

  • Le “Chanvre” est la traduction française du mot latin “Cannabis”. On parlera plus communément de chanvre pour les variétés qui contiennent moins de 0,2% de THC (Tétrahydrocannabinol) destinées à la production de graines et de fibres. On parlera plus communément de cannabis pour les variétés à plus haut taux de THC et destinées à des usages médicaux et/ou récréatifs.
  • Le CBD (cannabidiol) quant à lui est un composé (cannabinoïde) extrait du chanvre. Le chanvre a diverses utilisations, tandis que le CBD est exploité pour ses propriétés relaxantes.

Quelle est la différence entre dépénalisation et légalisation ?

La distinction entre la dépénalisation et la légalisation du cannabis réside dans leur approche respective envers la consommation, la possession et la vente de cette plante.

  • La dépénalisation du cannabis implique la réduction des sanctions pénales associées à sa possession et à sa consommation, souvent en remplaçant les peines de prison par des amendes ou des mesures alternatives. Cependant, la production et la vente demeurent généralement illégales.
  • En revanche, la légalisation du cannabis va plus loin en autorisant non seulement la consommation et la possession pour un usage personnel, mais aussi la production et la vente réglementées de cette substance. Cela permet un contrôle strict de la qualité, de la distribution et des taxes associées, tout en mettant en place des politiques de prévention et de traitement des abus.

Ainsi, alors que la dépénalisation assouplit les sanctions liées au cannabis, la légalisation instaure un cadre juridique complet et transparent autour de sa réglementation et de son usage.

Vue d’ensemble de la législation actuelle du cannabis en Europe

La règlementation autour du cannabis, du CBD et du chanvre en Europe est aussi variée que les nations qui la forment. Les différents États membres ont mis en place leurs propres systèmes réglementaires, reflet des divers points de vue sur cette plante. Néanmoins, un mouvement d’harmonisation législative est en cours, grâce aux directives et arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui impactent les régulations nationales.

Alors que des pays comme les Pays-Bas adoptent une politique souple en autorisant la vente de cannabis récréatif et de CBD avec peu de contraintes, à l’opposé, des pays comme la Suède considèrent le CBD comme un médicament, ce qui soumet sa distribution à une régulation stricte (uniquement avec une prescription médicale).

De plus, la décision de la CJUE qui affirme que le CBD ne devrait pas être classé comme narcotique a poussé les États membres à revisiter leurs lois. Cette avancée a facilité l’assouplissement des lois relatives au CBD et à son acceptation comme produit de bien-être dans plusieurs nations.

Cette hétérogénéité de règlementations constitue un défi pour les entreprises qui opère dans l’UE, et souligne la nécessité d’une législation plus homogène à l’échelle européenne.

Dernières modifications législatives

Les récentes années ont été témoins de changements législatifs considérables en Europe concernant le cannabis.

Le statut du cannabis récréatif en Europe (Belgique et pays limitrophes)

Le cannabis en Belgique

Le cannabis récréatif qui contient plus de 0,3% de THC est interdit. La consommation de produits dérivés de plantes ayant plus de 0,3% de THC est interdite. Jusqu’au 6 septembre 2017, la détention de jusqu’à 3 grammes de cannabis ou d’une plante à plus de 0,3% de THC était toléré ; depuis, la Belgique est revenue à une politique de prohibition, tout en soumettant la détention et la consommation de cannabis à une « faible priorité de la politique des poursuites » lorsque les conditions suivantes sont réunies :

  • Le détenteur de cannabis est un majeur, c’est-à-dire une personne de plus de 18 ans.
  • La quantité de cannabis détenue est destinée à un usage personnel, c’est-à-dire qu’elle est de 3 grammes maximum ou d’une plante cultivée.
  • La détention n’est pas accompagnée de circonstances aggravantes ou de troubles à l’ordre public.

Concernant les produits au CBD, nous vous invitons à consulter notre article La législation sur le CBD en Belgique en 2024.

Le cannabis en France

La France est l’un des principaux consommateurs de cannabis en Europe. La loi de 1970 régit pourtant strictement la consommation, la possession et la distribution de cannabis.

  • La possession ou la consommation de cannabis récréatif est interdite dans tous les lieux, avec peu de distinction entre les usages thérapeutiques ou religieux, bien que certaines tolérances existent dans les territoires d’Outre-Mer comme la Polynésie. L’application de la loi varie selon l’interprétation individuelle et géographique, ce qui soulève des questions de révision de la législation.
  • La culture de cannabis pour un usage personnel est strictement interdite, avec des peines sévères en cas de violation. La distribution de cannabis est considérée comme un crime, avec des peines pouvant aller jusqu’à la réclusion criminelle à perpétuité et des amendes importantes. Les jugements peuvent être moins sévères en pratique.
  • Le CBD n’est pas classé comme stupéfiant en France, ce qui le rend légal. La vente et la possession de fleurs de chanvre à faible teneur en THC (<0,3%) sont autorisées, mais la culture de chanvre CBD par des non-agriculteurs est interdite.

Le cannabis au Luxembourg

Depuis le 21 juillet 2023, le Luxembourg autorise ses résidents à cultiver leurs propres plants de cannabis récréatif. Selon la loi votée en juin 2023, jusqu’à quatre plantes peuvent être cultivées par foyer et les plantes ne doivent pas être visibles depuis la voie publique. Les étiquettes des graines vendues doivent désormais aussi indiquer la teneur en THC, le pays d’origine et les coordonnées du producteur.

Si la culture du cannabis est désormais légale, sa consommation l’est aussi, mais uniquement dans des espaces privés et sans la présence de mineurs. La possession, la consommation ou la vente de cannabis dans les lieux publics restent interdites au Luxembourg.

Le cannabis en Allemagne

Le cannabis récréatif est légal en Allemagne depuis le 1er avril 2024. 

Avec la légalisation du cannabis en Allemagne, le gouvernement vise à combattre le marché noir et à réduire les risques liés à la consommation de produits de qualité médiocre ou dangereux, ainsi qu’à limiter l’usage de cannabis contenant un taux de THC inconnu.

La loi sur le cannabis, appelée “Cannabisgesetz (CanG)”, prévoit également des campagnes d’information et des programmes d’intervention destinés aux jeunes, tout en interdisant la publicité et le sponsoring liés à la consommation de cannabis.

Le gouvernement allemand met en place sa politique en plusieurs étapes, appelées “piliers”:

  • Le premier pilier concerne l’encadrement légal de la possession, de la consommation et de la culture du cannabis à domicile, en vigueur depuis le 1er avril 2024, ainsi que la création de “clubs de cannabis” à partir du 1er juillet 2024.
  • Le deuxième pilier envisage la vente de cannabis dans des magasins spécialisés, bien que le gouvernement n’ait pas encore présenté de texte à ce sujet.

Quant aux conditions pour bénéficier de la légalisation du cannabis en Allemagne, il faut être résident allemand depuis plus de 6 mois et avoir plus de 18 ans. Les clubs de cannabis sont également réservés aux majeurs résidant en Allemagne depuis plus de 6 mois. Ces associations à but non lucratif pourront vendre à leurs membres un maximum de 25 grammes par jour et pas plus de 50 grammes par mois.

Les personnes qui ne résident pas en Allemagne n’ont aucun moyen légal d’acquérir du cannabis. En cas de possession de cannabis, elles encourent des poursuites pour acquisition illicite de drogue ou importation illégale, passibles d’amendes et de peines d’emprisonnement allant jusqu’à 5 ans pour possession de stupéfiants sans autorisation, et d’au moins 2 ans en cas d’infraction assimilée au trafic de drogue.

Nouvelles orientations politiques sur le CBD en Europe

Implications de la Cour de justice de l’Union européenne

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a radicalement influencé la réglementation du CBD en Europe. En novembre 2020, une décision capitale a été rendue : « Un Etat membre ne peut interdire la commercialisation du cannabidiol légalement produit dans un autre Etat membre », écrit-elle dans un communiqué. Et ce, quand bien même ce CBD « est extrait de la plante de Cannabis sativa (chanvre) dans son intégralité et non de ses seules fibres et graines ».

Ce jugement a souligné l’importance d’une réglementation unifiée au sein de l’Union. De plus, la CJUE a précisé que toute limite imposée au CBD doit viser la protection de la santé publique. Ces limites ne doivent pas excéder ce qui est strictement nécessaire pour atteindre cet objectif.

Les répercussions de ces arrêts sont considérables. Elles affectent tant la commercialisation du CBD que sa réputation et son potentiel sur le marché européen.

Les recommandations de l’OMS sur le CBD

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a aussi joué un rôle clé dans l’évolution de la perception et de la réglementation du CBD à l’international. En 2017, elle a suggéré de ne pas classifier le CBD comme une substance contrôlée, en raison de son absence d’effet psychotrope et de risque pour la santé humaine. Une substance contrôlée est toute forme de drogue que le gouvernement fédéral a catégorisée comme ayant un potentiel d’abus ou d’accoutumance plus élevé que la moyenne. Ces drogues sont divisées en catégories basées sur le taux potentiel d’abus ou d’accoutumance.

En outre, l‘OMS a reconnu le CBD comme un traitement prometteur contre l’épilepsie, y compris chez les adultes, enfants et animaux. Elle a également souligné les potentialités du CBD dans la lutte contre des pathologies sévères comme la maladie d’Alzheimer, le cancer, la psychose et la maladie de Parkinson.

Ainsi, les recommandations de l’OMS ont stimulé une réévaluation mondiale du CBD. Ce mouvement a mené à une reconnaissance grandissante de ses vertus thérapeutiques et à une réglementation assouplie.

Impact du cadre réglementaire sur le marché du CBD

Influence sur les producteurs de chanvre

champ de chanvre en belgique

La législation actuelle influence significativement les cultivateurs de chanvre. La légalisation graduelle du CBD a provoqué un boom de la demande pour des souches pauvres en THC. Ceci a mené à une extension des terrains de culture ainsi qu’à une diversification accrue des produits à base de chanvre.

Face à ces opportunités, les producteurs rencontrent des défis majeurs. Ils doivent se plier à des réglementations en perpétuel changement et investir dans des techniques de culture et de transformation conformes aux normes. Dans ce contexte, les associations de professionnels deviennent cruciales pour la défense des intérêts des producteurs et pour stimuler la recherche visant à améliorer la qualité et l’efficience de la production.

Leader européen dans ce secteur, la France a vu ses producteurs s’ajuster promptement aux nouvelles avenues du marché. Ils font face à la pression des coûts de production et appellent à une réglementation uniforme au sein de l’UE pour simplifier le commerce transfrontier.

Conséquences pour les commerçants et les consommateurs de CBD

Le secteur commercial du CBD connaît une expansion sans précédent, marquée par un accroissement du nombre de boutiques spécialisées et de plateformes en ligne. Ce dynamisme trouve son origine dans l’intérêt grandissant des consommateurs pour les effets bénéfiques du CBD sur le bien-être.

Cependant, cette croissance s’accompagne de défis réglementaires considérables. Les commerçants naviguent dans un cadre légal flou, ponctué d’incertitudes et de risques légaux. Des décisions telles que l’interdiction de certains cannabinoïdes réduisent l’offre de produits disponibles et peuvent menacer la pérennité des entreprises.

Quant aux consommateurs, ils sont directement affectés par cette réglementation. Elle détermine l’accessibilité, la qualité et la sûreté des produits de CBD disponibles. Si certains profitent d’un choix plus large et régulé, d’autres subissent des contraintes ou des informations produits incohérentes. Il apparaît donc essentiel d’établir une réglementation transparente et uniforme.

Enjeux futurs et réformes attendues

Harmonisation de la législation européenne sur le CBD

Face au défi d’harmoniser la réglementation du CBD dans l’Union Européenne, un enjeu majeur se présente. Les normes diffèrent actuellement d’un État membre à l’autre, avec des taux de THC allant de 0,2 % à 0,3 %. Cette diversité entrave le commerce transfrontalier et l’uniformité du marché intérieur.

Pour aboutir à une règlementation uniforme, des initiatives sont prises. Elles incluent les décisions de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et les orientations de l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) pour le CBD comme nouvel aliment. L’ambition ? Atteindre un cadre législatif qui garantit la sécurité publique tout en favorisant l’essor économique du chanvre .

Cette uniformisation viserait également à clarifier les règles pour les consommateurs et à accroître la confiance dans les produits à base de CBD. En garantissant une qualité et une sûreté constantes en Europe, elle simplifierait la dynamique du marché .

Débats en cours et perspectives d’évolution

Les discussions qui entoure le CBD en Europe se concentrent sur sa légalité, sa réglementation et son impact sur la santé publique. Par exemple, la France a récemment catégorisé certains cannabinoïdes comme stupéfiants, tout en admettant le CBD avec moins de 0,3 % de THC. Ces échanges soulignent la complexité de réguler le CBD et l’importance d’un équilibre entre contrôle et accessibilité .

Des changements sont en vue, comme la potentielle reclassification du CBD par la Commission européenne. Cette mesure affecterait les règles sur les nouveaux aliments et pourrait élargir le spectre des produits à base de CBD disponibles sur le marché .

De plus, les recommandations de l’OMS et les recherches sur les effets du CBD pourraient enrichir notre compréhension de ses avantages et risques. Ces avancées pourraient mener à des règlementations plus précises, adaptées aux dernières découvertes scientifiques .

Conclusion

La législation autour du CBD et du cannabis en Europe est actuellement en pleine évolution. Cette mutation traduit une volonté de parvenir à une réglementation plus uniforme et à un marché davantage accessible. Face à cette situation, il est crucial pour les producteurs, commerçants et consommateurs de se tenir au courant et de se préparer à s’ajuster aux nouvelles directives.

Les perspectives d’avenir sont porteuses d’espoir : elles suggèrent d’éventuelles réformes. Ces dernières pourraient alléger les procédures commerciales et faciliter l’accès aux divers produits de CBD. Cela met en lumière l’importance cruciale de rester vigilants sur les évolutions législatives. S’impliquer activement dans les discussions en cours est fondamental pour contribuer à l’élaboration d’un environnement réglementaire qui favorise aussi bien l’équilibre que l’innovation.